S'il est habituel de voir des expositions itinérantes pour présenter les mangas aux néophytes dans les bibliothèques et autres médiathèques, il est beaucoup plus rare d'avoir un événement d'envergure comme ce Manga<->Tokyo installé à la Grande Halle de la Villette du 29 novembre au 30 décembre 2018. En arrivant sur la parvis de la Villette depuis la station de métro Porte de Pantin, il est difficile de rater l'événement grâce aux affiches géantes montées pour l'occasion.

Le couloir d'entrée de l'exposition délimite deux boutiques sur lesquelles je réviendrai plus tard et débouche sur une immense maquette de Tokyo spécialement faite pour cette opération à l'échelle 1/1000e au sol et sous un écran géant, où défile des extraits de dessins animés, de films et de jeux vidéo japonais ayant la capitale nippone comme cadre. Pendant chaque extrait, le quartier lié au titre projeté sur l'écran est éclairé sur la maquette pour localiser l'action. La représentation en 3D est plus parlante et donne un meilleur aperçu des distances entre les différents lieux.

Pour ma part, cela m'a permi de mieux situer Odaiba que j'avais tendance à trouver moins étendue qu'en réalité. Avec ses projections en boucle, cette maquette centrale fournit un fond sonore à l'ensemble de l'exposition répartie à l'étage, tout autour de cet espace. La disposition des lieux permet de circuler librement même lorsqu'il y a du monde dans certains sections.

Depuis le 1er étage, il y a aussi des observatoires avec des jumelles pour pouvoir scruter la maquette plus en détail. La plateforme permet d'avoir effectivement une meilleure vision d'ensemble qu'en était au rez-de-chaussée mais les jumelles n'apportent pas grand chose, les bâtiments n'étant pas si détaillés que ça et surtout unicolore à part les parcs et quelques immeubles particuliers, ce qui ne facilite pas le repérage.

Au rez-de-chaussée, un atelier propose de rédiger des voeux sur des tablettes ema en papier et de les accrocher sur un emakake installé à cet usage.

Comme le titre Manga <-> Tokyo l'indique, le thème de l'exposition est bien centré sur Tokyo et sur sa représentation dans l'imaginaire japonais. Cela va cependant bien plus loin que le manga papier et l'exploration couvre l'animation japonaise mais aussi les jeux vidéo et les films live, avec en premier lieu les opus de Godzilla. Les supports ne manquent pas avec des panneaux explicatifs, les dessins issus des différentes productions, les vidéos ou encore quelques figurines et des statues à grande échelles.

L'agencement a été pensé pour aborder différents points de vue, même si plusieurs peuvent surprendre quand il s'agit de s'intéresser aux différentes fins apocalyptiques de la capitale japonaise ou de ses bâtiments phares, que ce soit la tour de Tokyo ou bien la mairie. Il est aussi question du traitrement des différents tremblements de terre et des incendies. Si le choix des sujets peut surprendre, le traitement est intéressant, où avec quelques exemples, les principaux aspects sont rappelés ainsi que leur importance. Si plusieurs événements sont de véritables catastrophes qui ont laissé la ville exangue, les incendies faisaient partie des préoccupations de la population et explique les remedolages forcées de la cité au fil des siècles.

Moins tragique, l'exposition reprend aussi quelques particularités culuturelles de la ville en s'intéressant à représentation de la vie d'autrefois, même si cela reste réducteur en s'attardant surtout sur les quartiers deplaisir, avant d'aborder un genre plus tranche de vie en abordant le début du XXe siècle. C'était l'occasion de découvrir des planches de titres abordant ces époques tels que le manga Kenshin le vagabond, le jeu Sakura Wars ou encore le film Combustible. Le tout est mêlé avec des documents d'époque qui permettent d'établir un lien explicatif et de ce côté-là la présentation est réussie. Le choix de thème permet de survoler plusieurs oeuvres sans subir un effet catalogue qu'aurait eu une simple énumération.

Pour chaque oeuvre, vous trouvez un petit encart avec un synopsis et pour les mangas, chaque tirage présenté en version originale est doublé par une version plus petite avec une version traduite en français. la traduction n'est pas indispensable étant donné qu'en général seules des pages isolées sont montrées mais c'est plus confortable à suivre, même si l'impression palote de ces traductions ne facilite pas la lecture. En revanche, les synopsis étaient laborieux, notamment lorsque le manga et son adaptation en anime sont affichés cote à cote, ce qui donne quasiment deux fois le même synopsis, voir 3 fois dans le cas du manga  Haikara-san ga Tooru porté à l'écran dans une série télévisée en 1978 mais aussi dans un film en 2017.

Arrivé historiquement dans la 2e moitié du XXe siècle, l'exposition se restreint dans les choix alors que la production de mangas explose à cette époque. City Hunter, Lupin III et Ashita no Joe ont droit à être cités ainsi que quelques titres pour illustrer le josei ou des nouvelles publications nées sur internet.

La visite se termine par l'approche des produits dérivés et de l'apparition dans le réel des personnages de manga, que ce soit d'abord par la publicité, les machines pachinko ou bien les statues, avec notamment le Gundam géant à Odaiba, sans oublier de mentioner la notion de pélerinage des fans, étant donné que beaucoup d'histoires se déroulent dans des quartiers réels de Tokyo.

Une petite moitié de rame permet d'avoir l'impression dans un train tokyoïte avec le paysage qui défile derrière les vitres et un intérieur aux couleurs d'une campagne passée de Love Live.

Une autre salle présente un mini convenient store à l'effigie de Hatsune Miku, avec moult produits à son effigie. Cette dernière partie est plus visuelle et ludique qu'informative.

Le volume de contenu m'a paru relativement succinct pour un prix d'entrée fixé à 15€, même si ce contenu est bien servi par les présentations multimédia et les animations, et qu'il faut bien compter une petite heure pour en faire le tour en prenant son temps. Cela m'a paru moins enthousiamant que l'était l'exposition sur les layouts du studio Ghibli par exemple.

Ne comptez pas sur l'exposion pour offrir un panel exhaustif des mangas ni même des principaux auteurs. Si mes souvenirs sont bons, nulle part il n'est question du studio Ghibli, de Leiji Matsumoto ou de Rumiko Takahashi, et encore moins de One Piece ou Dragon Ball. Tokyo reste quand même le trait d'union entre les panneaux et le choix des oeuvres a du aussi dépendre de la participation ou non des éditeurs qui ont apporté leur pierre à l'édifice. D'un autre côté, cela ne fait pas de mal d'échapper aux sempiternels couplets sur Osamu Tezuka ou sur Shôtarô Ishinomori présentés ici sous un angle différent.

Notez la tenue de conférences exceptionnelles - incluses dans le prix d'entrée même s'il faut penser à réserver soit à l'avance ou sur place à l'accueil. Le 9 décembre 2018, il y avait des gens du studio Trigger pour parler d'animation et le 23 décembre, c'est au tour de la mangaka Erica Sarukazawa de revenir sur sa carrière et de dessiner en direct.

Je termine cet aperçu par les deux boutiques situées à l'entrée. Les 2 espaces, intitulés respectivement otome road shop et Akihabara et présentés spécialisés dans les mangas pour public masculin pour l'un et mangas pour public féminins pour l'autre, ne correspondaient pas à cette configuration. La partie Akihabara comporte en fait un large éventails de figurines du distributeur Good Smile Company, avec bon nombre de nendoroids et de figma mais aussi plusieurs scales.

À mi parcours de l'exposition, les étagères sont encore pleines avec des prix plutôt dans le haut de la fourchette, même en France, mais pas excessifs non plus pour ceux qui ont pris l'habitude de mettre 40€ dans une nendoroid. C'est moins intéressant pour les scales sauf peut-être les quelques modèles devenus rares et coûteux à faire envoyer par transporteur. Ayant d'autres flux d'approvisionement et ayant le fait le plein, je n'ai rien acheté sur place mais cela pourrait quelques collectionneurs, sachant qu'il faut cependant s'acquiter du prix d'entrée de l'exposition pour pouvoir y pénétrer.

L'autre espace commercial propose des produits dérivés de multiples licences, même pour des titres peu connus en France. Les goodies sont classiques, des porte-clefs aux pochettes, avec aussi des stores et mêmes des illustrations sous cadre. Ces dernières dépassaient les 100€ mais même pour les autres gadgets, j'ai trouvé ça très cher, avec notamment des shitajiki au delà des 15€ ou des prochettes plastiques dans le même ordre de prix. Après, cela fait longtemps que je ne me suis pas renseigné sur les prix pratiqués dans les boutiques françaises spécialisées, achetant d'ailleurs très peu ce genre d'articles même sur les sites japonais. J'ai juste remarqué une grande variété au moins au niveau des licences à défaut d'avoir des produits très originaux.